MONOGRAPHIE
D'ERIZE-LA-GRANDE




— DEPARTEMENT DE LA MEUSE —

Arrondissement de Bar-le-Duc


Monographie
de la
Commune d'Erize-la-Grande
par M.ANCEL, Instituteur.




I. Commune d'Erize-la-Grande

    Nom de la commune en français : Erize-la-Grande.
En patois : Idem.
Avant 1789 : Idem.
Pendant la révolution : Idem.

Etymologie probable ou certaine (Ericia Magna). Le nom du village d'Erize semble être un dérivé de Ezerule, ruisseau qui traverse le territoire ; le surnom de Grande doit être attribué, non à son étendue, mais au chiffre de la population du village qui anciennement était plus fort que dans les autres Erizes.

Section, hameaux, écarts qui en dépendent :
Les maisons du village sont agglomérées. Comme écart il n'y a que le petit moulin «De Breuil» alimenté par l'Ezerule. Il se trouve à 800M et au N. du village, à 100M de la route départementale de Bar à Verdun.


II. Géographie

1° Position de la commune. Erize-la-Grande se trouve sur le 2°50'22" de longitude Est, sur le 48°50'34" de latitude Nord, et à une altitude de 200M environ. Le signal le plus élevé du village est coté sur la carte d'état-major à 311M.
La distance à Vaubécourt, chef-lieu de canton est 11Km, Bar-le-Duc, chef-lieu d'arrondissement et du département est de 21Km, Nancy est de 100Km ; à Paris est de 274Km.

2° Limites et aspect du territoire. Ce village est limité au N par le territoire d'Erize-la-Petite ; au Sud par celui de Rosnes ; à l'Est par celui de Longchamp ; à l'Ouest par celui de Marats.

Le territoire est pierreux et montagneux, sauf une petite vallée sur les bords de l'Ezerule. Il présente à l'Est et à l'Ouest du ruisseau deux flancs assez élevés qui conduisent à deux plateaux : l'un, celui de l'Est, le sépare de la vallée de l'Aire ; l'autre, celui de l'Ouest, le sépare de la vallée de la Chée.

3° Orographie. Le village est encaissé dans une petite vallée de 500 à 600M, formée par deux des nombreuses ramifications de l'Argonne occidentale. Celle de l'Est qui atteint une altitude de 318M se termine à 2Km du village dans la direction du Nord, ou plutôt forme un col qui permet à l'Aire d'obliquer vers l'Ouest.
    Celle de l'Ouest dont le point culminant est de 314M «Au bois du Fays» où ont eu lieu les manoeuvres de brigade le 9 7bre 1888, côtoie la rive gauche de l'Ezerule ; puis à 1Km du village, elle abandonne la direction du Nord pour obliquer vers le Nord-Ouest. C'est sur le sommet et le flanc de cette colline que le chemin de fer de la concession Varinot a dû être construit pour réunir la vallée de la Chée à celle de l'Aire.

4° Hydrographie. L'Ezerule est le seul cours d'eau qui traverse le territoire. C'est un petit ruisseau qui naît à Erize-St-Dizier et se jette dans l'Aire près de Courcelles-S/Aire, après un parcours de 15Km. Il arrose tous les villages de la vallée, en suivant la direction du Nord, puis il oblique vers l'Ouest jusqu'au lieu de son confluent.
    Sur le versant Oriental et en amont du village, on aperçoit la fontaine de «Rouvier» dont les eaux limpides et glaciales arrosent quelques prairies élevées.
    Sur le versant Occidental près des maisons coulent de nombreuses petites sources qui ont été réunies et servent à l'alimentation du village au moyen d'une borne fontaine, et de bacs pour l'abreuvoir du bétail, placés sur le devant de la mairie et du logement de l'instituteur ; ces eaux se déversent dans le lavoir public qui leur est contigu, puis s'écoulent dans l'Ezerule.

5° Géologie. Le territoire est composé de deux sortes de terrains. Dans la vallée on y rencontre des terres d'alluvion dont la fertilité est prodigieuse ; mais sur les flancs des montagnes et sur les plateaux on se trouve en présence de terrains rocheux comme sur la grande partie des plateaux de la Lorraine.
    Mais que de soins assidus, que de travaux constants il a fallu pour les transformer en terres de rapport.

6° Climat. Le climat est sain. Les chaleurs de l'été sont tempérées par des courants d'air formés par la disposition de la vallée ; mais par contre, en hiver, les vents du Nord et de l'Est se font vivement sentir.
    Orages. Par suite de la position topographique, le village n'a pas à redouter les orages qui semblent toujours se diriger vers le Nord-Est en côtoyant la droite du pays. Mais les plateaux ne sont pas épargnés, témoin l'orage suivi de grêle du 27 Juillet 1888 qui en contournant la partie Ouest du plateau occidental, a occasionné des dégâts évalués à 30000 Fr.
    Un phénomène est à considérer : cette même partie a déjà été ravagée il y a une dizaine d'années.
    En résumé les orages semblent suivre un courant dû à une dépression des hauteurs entre la vallée de la Chée et celle de l'Aire.
    Grêle. La grêle occasionne rarement des dégâts importants, sauf le point signalé précédemment.
    Trombes. On a déjà constaté des trombes d'eau, mais les effets n'ont jamais eu de suites désastreuses. Des ouragans violents s'engouffrent parfois dans le vallon et déracinent de gros arbres soit dans les forêts soit sur la route, mais jamais on n'a eu à déplorer d'accidents de personnes.

7° Curiosités naturelles. Il n'y a aucune curiosité sur le territoire mais les habitants s'enorgueillissent d'une forêt de sapins plantée par le desservant Mr.BOURIOT, vers 1850 à 1Km du village sur le versant Est du plateau occidental.
    Au milieu de cette sapinière, il a fait élever une statue à la Vierge, sur un piédestal en pierre. C'est plutôt un petit monument commémoratif qu'une oeuvre d'art.
    C'est un beau site qui sert de but de promenade par suite de l'accès facile que lui donne la route départementale de Bar-le-Duc à Verdun, laquelle route longe cette sapinière.

8° Flore et faune de la localité. Le territoire ne produit que des plantes communes que l'on trouve dans toute la région du Nord-Est. Tout le monde les connaît ; il est inutile de les désigner, à moins d'entrer dans des détails que ne comporte pas ce travail.
    Les animaux qu'on rencontre soit à l'état domestique, soit à l'état sauvage sont :
    1°/. Les chevaux, exclusivement employés pour les travaux de culture ; le boeuf, nourri à l'étable pour la boucherie ; la vache, animal précieux pour son laitage envoyé à la fromagerie de Rumont, et pour son beurre dont la finesse et l'arome sont appréciées des amateurs ; le mouton est élevé en grand pour le commerce, et le troupeau compte de 650 à 700 têtes, chiffre assez important pour une petite localité.

    2°/. Les chasseurs, outre le petit gibier à poil, tel que le lièvre, et à plumes comme les perdrix, les cailles, les alouettes, les bécasses, les canards sauvages et les poules d'eau se tenant aux abords du ruisseau, etc ... mais dont la rareté s'accentue chaque année, les chasseurs, dis-je, rencontrent quelquefois dans les battues organisées en hiver par les adjudicataires des chasses des bois, des loups, des renards et des sangliers, mais rarement des chevreuils.

Bois et forêts.
    La commune d'Erize-la-Grande possède 76Ha de bois situés sur chacun des versants qui bordent le vallon, non compris une sapinière de 6Ha75.
    L'essence de bois la plus répandue est le chêne ; peu de hêtre et de charme ; mais ces arbres n'atteignent pas de grandes proportions à cause de la constitution rocailleuse du sol. On remarque aussi quelques pieds de tremble, d'alizier, de cornouiller.
    Les bois sont soumis au régime forestier et font partie de l'Inspection de Bar-le-Duc, du cantonnement de Triaucourt, qui relèvent de la 16ème Conservation de la Meuse.
    L'aménagement a été exécuté en 1837 par Mr.GROSJEAN, arpenteur forestier.
    Chacune des 25 années donne une coupe ordinaire de 2Ha¼ approximativement, que le conseil, selon les besoins de la caisse municipale vend par adjudication aux enchères, on délivre en affouages aux habitants.
    Le quart en réserve a une contenance de 19Ha. Le produit est exclusivement affecté à de nouvelles constructions, à de grosses réparations, et à l'entretien des charges communales.
    En résumé le territoire d'Erize-la-Grande est couvert de beaux bois, et les q.q Ha de friches qui ne sont pas plantés, sont destinés au pacage du troupeau.

9° Population.

Années Population Maisons Feux
En 1789 " " "
En 1846 325 91 102
En 1850 313 91 104
En 1860 289 86 99
En 1870 256 78 86
En 1875 253 76 86
En 1881 235 75 85
En 1886 219 71 79


    Si le nombre des maisons a diminué, l'emplacement est resté le même, l'extension de la culture a nécessité de plus vastes bâtiments qui ont été construits sur les fondations de masures très exiguës.
    La population dans l'espace de 35 ans a diminué de près de 100 habitants. Les causes de cette décroissance sont connues : c'est l'abandon de la vie rustique et laborieuse, de l'ouvrier de la campagne pour l'existence plus commode et le travail plus rémunérateur qu'il trouve à la ville.

10° Agriculture. La surface totale du territoire s'élève, d'après le cadastre, à 1026Ha72, affecté à chacune des cultures suivantes :

Céréales et autres farineux alimentaires 720Ha
Cultures potagères et maraîchères 46Ha
Cultures industrielles "
Prairies naturelles 78Ha
Prairies artificielles 64Ha
Vignes "
Bois et forêts 105Ha
Landes et friches 10Ha

Le surplus est occupé par le ruisseau et les chemins ou routes.

Mode de culture.
    Les cultivateurs de la localité ont adopté l'assolement triennal.
1er année : Blé
2ème année : Orge ou avoine
3ème année : Jachères, légumes ou fourrages

Instruments agricoles.
    Les instruments employés sont tous perfectionnés, telle est la charrue, système Dombasle, le scarificateur, les herses de bois et de fer, les houes à cheval, les faucheuses, les rateaux à cheval ; on y a même fait l'essai d'une moissonneuse-lieuse.

Produits agricoles.
    Les principaux produits de la localité, assez remarquables pour la qualité et la quantité, sont, parmi les céréales : le blé, l'avoine et l'orge, dont le rendement moyen est 2500Qx de blé, 3000Qx d'avoine et 500Qx d'orge. La majeure partie des 2 premières est livrée au commerce.
2°/ Pour les légumes, la production de la betterave s'élève à 20000Qx exclusivement pour la nourriture et l'engraissement du bétail, etc... celle de la pomme de terre fournit en moyenne 30000Qx qui sont destinés à l'alimentation des personnes et des animaux de la race porcine.

Elevage. Alimentation.
    Tous les habitants sont persuadés que la source de prospérité de toute culture est le bétail qui permet de féconder la terre et en même temps qui donne une bonne rémunération par sa viande et par ses produits journaliers.
    Chaque ménage possède une étable pour nourrir une vache ou des moutons. Les cultivateurs élèvent en partie leurs chevaux.

Le mode d'alimentation est le pain blanc de froment fourni par le boulanger ; et le porc salé, que l'on remplace le Dimanche par le pot-au-feu et quelquefois en semaine par le lapin, la volaille ou le laitage, beurre ou fromage.
    Le gibier des forêts et les truites de l'Ezerule tendent à disparaître de plus en plus et n'apparaissent guère que sur la table de quelques rares privilégiés.
    Le vin est servi sur la table à chaque repas au moment des rudes travaux de labours, de semailles, de fenaisons et de moisson ; en d'autres temps , il est remplacé par diverses boissons fabriquées par les propriétaires.

    En résumé si le travail est actif, la nourriture est saine et fortifiante.

Année Céréales
et autres farineux
Cultures
potagères et
maraîchères
Industrielles Prairies
Naturelles  Artificielles
Vins
  Hectolitres Valeur   Quintaux Quintaux Hectolitres
1800 " " " " " "
1858 8130 8280T " 1820 1050 "
1860 9850 10500T " 1750 1580 "
1870 9240 12420T " 1850 1650 "
1880 10185 13750T " 1890 1840 "
1887 10430 15150T " 2050 2430 "


11° Industrie - Usines, fabriques, carrières. Il n'y a aucune industrie dans la localité. Le petit moulin «du Breuil» de deux paires de meules est la seule usine.
    On extrait d'une petite carrière située sur le plateau occidental, à peu de distance du village, une sorte de pierre granilique très dure et très difficile à tailler. On l'emploie dans les environs pour caniveaux, bordures de trottoir et constructions diverses où d'autre pierre ne pourrait résister.

12° Commerce - Voies de communication. Le seul commerce consiste dans la vente du bétail et des produits de la culture : blé et avoine que les propriétaires transportent sur leurs chariots à Bar ou à Vavincourt.
    Le prix de ces denrées varie suivant les besoins de la spéculation ; et même dans l'année, selon que la vente s'effectue en hiver ou en été, on constate des différences des prix s'élevant de 3Fr. à 4Fr. par quintal, comme le fait s'est produit en 1887 et 1888.
    La seule voie de communication est la route départementale N°2 de Bar à Verdun, cette route a été fréquentée jusqu'au 25 Xbre 1873 par le service des diligences qui a été suspendu par suite de l'exploitation du chemin de fer de la vallée de la Meuse, et le chemin d'intérêt commun conduisant à Marats est le seul chemin que la commune devrait entretenir ; mais il n'est même pas classé malgré les demandes réitérées du Conseil, cependant le produit annuel des prestations s'élève à plus de 1000Fr.
    La localité n'a aucun moyen de communication par voie ferrée ; la plus rapprochée est celle de Bar à Clermont dont les gares sont éloignées de 7 à 8 Km.

13° Administration communale. La commune ayant une population de 224 habitants a un conseil de 10 membres et un seul adjoint. La dernière élection date du 4 Mai 1888. Tous les élus faisaient partie de l'assemblée précédente.

Ce sont M.M
1 RENAULD Emile, Maire 6 RAULIN, Eugène, propriétaire
2 PASQUIN Jean-François, Adjoint 7 RAULIN Edmond, propriétaire
3 RENAULD Théophile, ancien maire 8 GORELLE Adrien, propriétaire
4 HUTIN Jean-François, ancien maire 9 TROYON Paul, propriétaire
5 BOURY Etienne, ancien adjoint 10 LECOMBE Eugène, propriétaire

14° Monuments, ruines, objets rares ou antiquités. Actuellement on ne rencontre aucun vestige remarquable des temps anciens.
    Cependant tout porte à croire qu'il existait un camp romain vers la partie S.E du territoire dite «les Varnettes» on y a découvert des vestiges d'habitation et un four qui était assez bien conservé. A peu de distance de cette contrée au lieu dit «le cercueil» les vieillards se rappellent avoir entendu leurs pères raconter qu'on y avait trouvé un cercueil de pierre renfermant un sabre de grande dimension.
    Cet endroit se trouve sur le versant Ouest du plateau oriental. Il est traversé par le chemin de La Cateline qui conduit à Longchamp et à Pierrefitte (villages situés dans la vallée de l'Aire). C'est l'ancienne route romaine de Châlons-sur-Marne à St-Mihiel, qui encore aujourd'hui, traverse la vallée et l'Ezerule aux Varnettes et remonte sur le plateau occidental aux Doriates.
    En construisant la sacristie, il y a 30 ans environ, on a découvert un cercueil en pierre renfermant un fémur pétrifié. Ce tombeau a été déposé à la cure, mais il a disparu.
    Quelques personnes ont trouvé sur le territoire des pièces anciennes de monnaies d'argent et de cuivre frappées 278 après J.C avec l'effigie très bien conservée de l'Empereur Probus.
    Comme ancien monument on voit encore les ruines de l'ancien couvent de La Reculée, habité par les Seigneurs d'Erize, les comtes de St-Pierre et les chevaliers de l'Escale, dont les descendants sont très honorablement connus dans les environs. Ce couvent a été en partie détruit par les Suédois au moment de la guerre de Trente ans. Ce qui en reste a été acquis par quatre propriétaires qui gardent précieusement quelques rares curiosités surtout des derrières en fonte de foyer.
    Dans l'un des 4 lots, la commune y a établi le presbytère, propriété qui a été achetée en 1826 à la famille de Herbillon.

15° Conditions hygiénique de la localité. L'air de la localité est sain, comme c'est général sur tous les lieux élevés. Aucune cause ne peut vicier l'atmosphère : les eaux des fontaines et du ruisseau s'écoulent rapidement et les prescriptions sanitaires de la police municipale sont bien observées.
    Sauf les choléras de 1832 et de 1854 qui n'ont fait que quelques victimes, on n'a jamais constaté de maladie épidémique ou endémique soit sur les grandes personnes soit sur les enfants.

III. Histoire

1° Origine de la commune - Les temps préhistoriques, l'antiquité - les romains, le moyen-âge, les temps modernes et l'époque contemporaine.
    Les archives communales ne possèdent aucun document relatif aux événements antérieurs à la révolution de 1789.
    Rien de ce qui est inscrit sur les registres tenus par le clergé (1740) ne saurait servir à reconstituer l'histoire de la localité.
    Erize dépendait de la paroisse de Chaumont comme l'établissent les quelques pièces trouvées dans les papiers de la mairie.
    Il s'y trouve aussi un arrêté du Conseil Royal des finances tenu à Versailles en Juillet 1691 et réclamant le 1/5 de la valeur d'un héritage de 1000 Livres soit 200 Livres et 43 livres 15 sols pour une jouissance de 7 ans 1/2 soit 243 L. 15 sols.
    Des lettres d'amortissement datée du 31 Xbre 1758 et signées par Stanislas Roy de Pologne ainsi que d'autres parchemins sont difficiles à lire par des antiquitaires improvisés.

Occupation allemande, réquisitions, contributions de guerre.
    L'année de 1870 a laissé un douloureux souvenir dans la population ; aux angoisses de la patrie foulée aux pieds par nos ennemis héréditaires se sont ajouté les privations endurées et les pertes subies par les habitants : les exigences et la rapacité des allemands ne connaissaient pas de bornes.
    La commune a dû supporter d'assez fréquents passages de troupes ; le plus important est celui du 24 au 25 Août. Elle a dû pourvoir à la nourriture et au logement des officiers et des chevaux d'un régiment entier de Bavarois qui se dirigeait sur Sedan.
    Les réquisitions ont été énormes pour une population si faible ; en une seule fois les allemands ont pris 18 des meilleurs chevaux, sans parler des autres réquisitions pour alimenter les troupes ou leurs chevaux.
    En résumé «l'état indicatif» des pertes totales supportées par la commune et les habitants se montait à 72000 Fr. non compris le montant des contributions foncières prélevées pour les ennemis par les soins du maire M.RENAULD, Théophile.
    La localité, grâce à la prudence de son administration et plus encore à un heureux concours de circonstances a eu la bonne fortune d'échapper à une contribution de guerre.
    Grâce aux secours du Gouvernement et à la vente de ses coupes de bois extraordinaires Erize-la-Grande s'était libéré entièrement de ses dettes de guerre pour 1880.

2° Le livre d'or de la commune : Personnages célèbres, détails curieux ou inédits - Acte de dévouements.
    On ne peut guère citer que le nom de ces personnes car on craindrait de blesser leur modestie. Erize à longtemps abrité dans le château la famille de l'Escale qui s'est fait une renommée dans l'armée et la magistrature ; il a vu naître le colonel HULIN et son frère Docteur en médecine, le capitaine de génie DECOMBE et le commandant en retraite MASSIN.

3° Instruction - Ecoles.
    L'instruction est répandue dans la population. On ne connaît pas de vieillards qui ne puisse lire, écrire et compter. Parmi la jeune génération un certain nombre d'hommes sont allés apprendre dans les pensions ou au lycée des connaissances plus élevées que celles enseignées à l'école primaire. Les jeunes femmes ne sont pas restées étrangères à ce mouvement intellectuel. Leurs parents leur ont fait donner une instruction indispensable à une véritable ménagère et une éducation nécessaire à une bonne mère de famille.
    Dès lors le français est général employé et le patois tend à disparaître.

    L'instruction primaire est donnée à Erize-la-Grande dans des écoles spéciales de garçons et de filles, dirigées par des maîtres laïques, pourvus de brevet.
    La construction de l'école des filles remonte à 1860 et la nouvelle de celle des garçons à 1839. L'ancien bâtiment mal disposé et peu convenable a été revendu aux époux PARISET.
    Quoique la moyenne des élèves ne s'élève qu'à 45, la commune tient essentiellement à conserver l'école des filles, car elle pense avec raison que si l'instruction peut être donnée indifféremment aux 2 sexes réunis, l'éducation est plus profitable quand elle est fait par une femme.
    Ces 2 écoles sont situées au centre du village ; mais si elles ont l'avantage d'être d'un accès facile, elles ont l'inconvénient de ne pas avoir de cour ni de jardin y attenant.
    L'instituteur possède à 250M de son logement un petit jardinet de 1A 30 et un verger de 15A qui a été créé sur des friches par l'instituteur GERARD, et que ses successeurs ont continué à améliorer. Malheureusement le produit qu'on en retire est faible et ne compense pas les soins qu'on y donne ni les travaux pénibles qu'on y a exécutés : c'est donc plutôt un lieu de distraction qu'une propriété de rapport, et cependant cet avantage n'est pas à dédaigner pour un instituteur de campagne qui n'a d'autre récréation, d'autre agrément que la lecture et l'étude.

4° Usages de la vie privée et publique.
    A la campagne il est facile de se rendre compte de la vie privée et publique de chaque habitant.
    La maison est toujours ouverte aux voisins qui, sous un prétexte quelconque, s'introduisent au milieu de la famille.
Ah! Combien de fois n'a-t-on pas raison d'envier l'antichambre du bourgeois de la ville pour se débarrasser des importins ! Mais les maisons ne sont pas disposées pour procurer cette commodité : ce serait un surcroît de dépense dans l'aménagement et l'ameublement.
    Cet ameublement, en général, est simple mais suffisant. Les vieux bahuts de chêne sont bien cirés, les cuivres des serrures sont passés au Tripoli chaque semaine ; le porte-vaissellier, imitation rustique du buffet étagère, orné de faïences peintes, est soigneusement épousseté ; le lit, fait le plus bel ornement de la cuisine, servant tout à la fois de salon, de salle à manger et de chambre à coucher ; les chaises en paille ont remplacé les escabeaux de bois.
    La question des vêtements préoccupe tant soit peu la ménagère ; depuis longtemps elle a répudié le béguin de toile et le petit jupon court, poétisé dans la fable de Perette. Les hommes, chaussés de bons souliers, portent la blouse ou le paletot de travail, mais le Dimanche il est difficile de reconnaître sous les costumes soignés, les bottines à hauts talons et les chapeaux de la dernière mode, les actives ouvrières de la semaine ; les hommes portent des vêtements de drap et préfèrent le chapeau à la casquette.
    Les enfants en général sont habillés avec plus de propreté que d'élégance.
    Toutes ces dépenses de toilette sont faites plutôt par convenance que par luxe, et ne diminuent en rien le confortable de la table dont j'ai parlé à la page 10.
    Dans une si petite localité le nombre des naissances s'élève en moyenne à 4 ou 5 ; celui des mariages à 1 ou 2, et celui des décès à 7 ou 8. Cette petite statistique indique clairement les causes de la décroissance de la population.
    Comme divertissement, il n'y en a aucun. Si ce n'est le jeu de cartes qui est en grand honneur, quant aux jeux d'adresse ils sont inconnus : il est vrai que les fatigues de la semaine portent à un repos bien gagné par 6 jours de travail. D'ailleurs les jeunes gens ne sont pas assez nombreux pour former une société quelconque : ils se refusent même le plaisir de la danse aux fêtes patronale et nationale ; c'est un divertissement qu'on ne goûte qu'à l'occasion des mariages.

Coutumes religieuses ou autres.
    La religion professée est le catholicisme mais les pratiques religieuses, tant soit peu démodées, restent le monopole des dames. Rien n'a pu combattre l'indifférence des hommes, pas même les parages de Benoite-Vaux, qui est le seul lieu de pèlerinage des environs, et encore est-il peu fréquenté par la population quoique sa distance ne soit que de 15 Km environ d'Erize-la-Grande.

APPENDICE

    Inventaire par ordre des dates des pièces les plus importantes des archives et copie de celles qui pourraient avoir de l'intérêt ou éveiller la curiosité.

    Sauf les 2 documents que j'ai mentionnés à la page 16, et qu'il m'est impossible de copier exactement à cause de la disparition de l'écriture due à la mauvaise qualité de l'encre, il n'y a aucune pièce qui puisse avoir de l'intérêt ou éveiller la curiosité des amateurs.

A Erize-la-Grande le 24 Xbre 1888.
L'instituteur.      


N.D.L.R : La transcription a été faite en respectant scrupuleusement l'orthographe de l'instituteur.





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